Le président colombien, Gustavo Petro, a réitéré sa dénonciation des secteurs de l’opposition qu’il accuse de préparer un coup d’État contre lui. Pour cette raison, il a également donné des détails sur les prétendus plans visant à le renverser.
Dans un long tweet, le président colombien a relaté les événements récents, qui indiquent l’existence d’une « conspiration » visant à « renverser » le gouvernement.
Dans cet écheveau complexe, les noms du procureur général, Francisco Barbosa, avec qui il a eu un long différend pour des vues opposées sur la politique et la justice, et de l’ancien président Andrés Pastrana, qui l’accuse d’avoir un « esprit totalitaire », se détachent, alors que des menaces de destitution pèsent sur lui.
Réunion des procureurs
Dans son tweet, M. Petro a évoqué « les visites de politiciens et de fonctionnaires au procureur péruvien, où un coup d’État vient d’avoir lieu avec elle comme protagoniste ».
Il fait ainsi référence à la réunion du 8 mai entre la chef du ministère public péruvien, Patricia Benavides, et son homologue colombien « pour renforcer les actions de coopération interinstitutionnelle qui contribuent à lutter contre les crimes dans les deux pays », selon un tweet publié par le ministère public péruvien.
M. Petro a eu plusieurs altercations avec le procureur général colombien. Lors de la dernière en date, qualifiée de « conflit de pouvoirs », les hautes juridictions du pays ont dû intervenir pour apaiser les tensions.
Le président a reproché à Barbosa l’inaction et le manque de rapidité de plusieurs fonctionnaires de cet organe qui, selon les médias, disposaient d’informations sur les menaces de mort proférées à l’encontre de 200 personnes qui ont finalement été assassinées par le Clan du Golfe.
Pastrana et les procès politiques
Dans sa longue interaction, M. Petro a rappelé que M. Pastrana – conservateur et farouche opposant à son gouvernement – avait demandé aux anciens présidents de droite d’Amérique latine de ne pas soutenir le président Guillermo Lasso dans sa « défenestration » par le Congrès équatorien, « parce que la même chose sera faite contre les présidents de gauche dans d’autres pays ».
En mars dernier, un groupe d’anciens chefs d’État et de gouvernement de droite, qui forment ce que l’on appelle l’Initiative démocratique de l’Espagne et des Amériques (IDEA), a mis en garde dans un communiqué contre l’intention des « partis d’opposition, des organisations sociales et de l’Assemblée nationale de l’Équateur de destituer le président Guillermo Lasso, élu par le peuple ».
Bien que Pastrana fasse partie de ce groupe et qu’il ait assisté à l’investiture de Lasso, qu’il considère comme un « grand ami », il n’a pas inclus ce document et n’a donc pas exprimé publiquement son soutien à ce dernier.
Face à cette apparente incohérence, un journaliste de la radio équatorienne Radio City a demandé à l’homme politique colombien la raison de l’absence de sa signature sur le communiqué.
L’homme d’affaires, signalé par Criterio comme lobbyiste de la compagnie pétrolière canadienne New Stratus Energy (NSE) en Equateur, a expliqué qu’il n’avait pas signé le texte parce que la constitutionnalité devait être garantie. « On peut aimer ou non le fait qu’il y ait des procès politiques, mais la constitution et la loi doivent être respectées », a-t-il déclaré.
M. Pastrana a affirmé que la Constitution équatorienne et celle de son pays établissent la possibilité d’un procès en destitution, raison pour laquelle il considère que la « procédure régulière » doit être respectée. « Nous ne pouvons pas appliquer que ces procès sont mauvais d’un côté et pas de l’autre », a-t-il ajouté.
Le diplomate et avocat milite depuis mars dernier en faveur d’un procès de destitution contre Petro en Colombie car, selon lui, il existe une « multitude de preuves » permettant de soumettre le président à une telle procédure. Selon lui, il existe des indices selon lesquels le leader du Pacte historique aurait des liens avec des organisations criminelles.
L’acier dilué
Pour sa part, Petro affirme qu’il existe une conspiration en cours, que l’on appellerait « l’acier dilué ». Selon lui, cela montrerait que les propos du colonel à la retraite Jonh Marulanda sur ce que l’opposition ferait pour l’évincer ne sont pas ceux d’un « fou ».
« Les secteurs politiques et économiques plongés jusqu’au cou dans l’argent de la cocaïne et la corruption ne veulent pas que le prochain procureur général nommé par le gouvernement mette fin à la corruption ». Le mandat de Barbosa, en poste depuis 2020, se termine l’année prochaine.
Le leader du Pacte historique a accusé à plusieurs reprises le chef du ministère public de défendre les intérêts des élites colombiennes liées au trafic de drogue et aux irrégularités administratives.
L’une des affaires les plus pertinentes est la plainte pour achat présumé de votes lors de la campagne électorale de l’ancien président Iván Duque, en 2018, dans laquelle le trafiquant de drogue décédé José Guillermo Hernández, alias « Ñeñe » Hernández, qui aurait agi sous les ordres de l’ancien président Álvaro Uribe, aurait été impliqué.
Bien que le parquet de Barbosa ait ouvert une enquête préliminaire, la procédure n’a pas progressé et seuls quatre policiers ayant intercepté les conversations téléphoniques de « Ñeñe » Hernández ont été arrêtés.
« Faire tomber le gouvernement »
« La voie à suivre est de faire tomber le gouvernement », écrit M. Petro. Selon lui, pour y parvenir, les groupes d’opposition intéressés par son départ « préparent l’argent » pour la commission d’enquête et d’accusation de la Chambre des représentants, qui reçoit les plaintes pénales ou disciplinaires contre les hauts dignitaires de l’État, y compris le président.
Jusqu’à présent, deux plaintes ont été déposées contre lui pour violation de données et pour avoir prétendument interféré dans des enquêtes judiciaires et violé la Constitution.
Le président sud-américain affirme également que ses opposants « tentent de diviser l’armée, pour voir si les soldats qui risquent leur vie sauveront les anciens officiers à la retraite qui sont liés au trafic de drogue et au génocide ».
« Le peuple a été prévenu. Le secteur des entreprises sait qu’il dispose d’une voie de croissance durable dans le cadre de la justice sociale ; la paysannerie sait que nous ouvrons la voie à une réforme agraire en sa faveur ; les travailleurs savent que nous allons améliorer leurs conditions de travail », a-t-il déclaré.
Enfin, M. Petro a exclu la possibilité d’un coup d’État contre lui. « Ce qui s’est passé au Pérou ne se produira pas ici. Ici, en Colombie, nous avançons avec détermination vers la démocratie, la justice et la paix », a-t-il déclaré.
Source: RT – Traduction: Romain Migus